Inspiré par un tas d’idées généreusement partagées sur Internet j’ai imaginé ma propre verision d’un piège à frelons asiatiques. Il me semble donner d’excellents résultats. Dès lors j’ai envie de partager cette idée ici. Peut être d’autres voudront l’essayer et éventuellement contribuer et partager leurs propres expériences, découvertes ou améliorations ?
Comme j’aime chipoter, j’ai longtemps réfléchi a des solutions employant de l’intelligence artificielle et des nouvelles technologies. Mais les circuits électroniques, il faut les alimenter, ça prend l’eau et les lasers ça peut être dangereux. Ceci dit, griller des frelons au laser me tente quand même et j’y reviendrai peut être. Cette autre idée m’apparait comme une solution plus simple, plus résiliante, moins couteuse et plus rapide à mettre en oeuvre !
Elle est venue de la lecture et des essais, depuis quelques années, de diverses solutions proposées par d’autres apiculteurs et de l’observation du comportement des frelons devant mes ruches. On va devoir apprendre à vivre avec et adapter notre apiculture à sa présence, mieux vaut se familiariser avec l’envahisseur !
Le frelon asiatique semble craintif. Il approche toujours les ruches de manière furtive. Il passe par dessous la ruche ou s’approche en rase-motte. Il est rapide et prudent. Je ne le repère le plus souvent qu’une fois en position de vol stationnaire devant une ruche.
Tout change, par contre, une fois qu’il a attrapé une abeille. Son vol est ralenti par le poids supplémentaire qu’il porte. Son réflexe est alors de fuir au plus vite. Une fois son méfait commis, très souvent, il va s’élever aussi vite que possible, verticalement, pour s’éloigner de l’entrée de la ruche avant de se diriger vers un arbre ou arbuste pour tuer et découper l’abeille capturée.
J’étais près des ruches et venais de lire un article à propos de l’idée d’un ingénieur français. Un système avec un « soufflet », une sorte de tube en textile, qui tombe mécaniquement pour emprisonner le frelon une fois reconnu à l’entrée de la ruche par un ordinateur.
En observant les frelons s’élever quasi verticalement après la capture d’une abeille devant mes ruches, je me suis dit qu’il n’était peut être pas nécessaire que le piège leur tombe dessus ? peut être ils pouvaient y entrer par eux même?
J’ai alors imaginé cette « volière à frelon« . D’abord l’idée d’une grande volière-piège recouverte entièrement de grillage placée devant la ruche, recouvrant la zone de chasse du frelon. Finalement, presque une muselière géante mais qui idéalement gênerait moins les abeilles. Le frelon entre dedans, capture une abeille, s’élève et ne ressort jamais. Un peu aussi comme la muselière-piège mais qui capturerait plus de frelons parce qu’ils entreraient plus facilement dedans.
Le grillage coûte cher. Comme j’avais une bâche de plastique transparent, je me suis dit que ça ferait l’affaire. En pus, les frelons ne voyant pas les objets transparents, j’ai imaginé que ça les perturberait d’autant plus.
Très enthousiasmé, j’ai construit le lendemain mon premier prototype, vite fait, avec le matériel que j’avais sous la main. J’avais une quasi certitude que ça pouvait fonctionner mais cela me paraissait tellement bête et simple que des doutes subsistaient.
Ça a fonctionné mieux que j’espérais ! Impatient, j’ai d’abord attrapé deux frelons au filet à papillon pour les lâcher, à hauteur de l’entrée des ruches, à l’intérieur de la volière. Ces frelons n’ont jamais trouvé la sortie.
Et il n’a pas fallu longtemps pour que le piège continue à se remplir de frelons, sans devoir les introduire moi-même. Par ailleurs, presque aucun autre insecte n’a été trouvé mort dans la bouteille. Pour 18 frelons asiatiques dans le premier piège, il y avait une abeille (mais je me dis que c’était peut être la capture d’un des frelons ? ) et un frelon européen. Après quelques jours et sur plusieurs pièges je trouve au total un frelon européen pour 147 frelons asiatiques, deux ou trois abeilles, une guêpe et une pyrale du buis. Ces résultats et le peu d’impact sur d’autres insectes me paraissent intéressants.
Une première version « brouillon » :
Il faut une structure assez grande, placée devant la ruche, entourée d’une bâche en plastique transparent et surmontée d’un grillage (mailles 6,5 à 7 mm) laissant passer les abeilles mais pas les frelons. Les frelons entrent dans cette structure pour chasser les abeilles et, une fois l’abeille attrapée se retrouvent piégés. Ils ne pensent pratiquement jamais à redescendre.
Cette première version a été très vite construite: 4 lattes de bois assemblées avec 4 vis pour former un cadre rectangulaire d’environ 70 sur 35 cm. Sur ce cadre j’ai tendu un grillage avec des agrafes. Sur un des petits côtés le grillage est soulevé au centre et entoure une petite bouteille de soda découpée. Son goulot forme un entonnoir qui mène dans une autre bouteille. Une fois passé le goulot, le frelon retrouve rarement la sortie et meurt épuisé ou noyé dans la deuxième bouteille.
Le cadre a été ensuite fixé sur 4 lattes plus longues (1m40) servant de « pieds ». Ces derniers ont été entourés d’une bâche en plastique et cette bâche est découpée sur le côté appuyé sur la ruche, autour de la planche de vol, et sur la face opposée, pour laisser les abeilles (et les frelons…) passer.
J’ai choisi de faire descendre la bâche jusqu’au niveau du sol pour deux raisons: Je pense que cela aide à capturer des frelons. Quand ils percutent la bâche sur un côté, perturbés, ils continuent à monter. Ensuite cela apporte aussi l’avantage de gêner le passage du frelon par en dessous de la ruche puisque celui-ci est bloqué.
Vu la simplicité du système, il est possible de le construire de plein d’autres manières. Utiliser des tubes en PVC, des piquets de tente, des tuteurs pour tomates… J’ai aussi vu au magasin de bricolage proche de chez moi une serre pour deux ou trois plants de tomates qui coute une vingtaine d’euros. Les dimensions semblent bien, la bâche transparente aux bonnes dimensions et ça doit être facile à adapter.
Le frelon n’a aucune hésitation à entrer dans la structure pour prendre sa position de chasse. je pense que c’est lié au volume de la volière et/ou peut être à la transparence des parois qu’il distingue mal. Quand il a attrapé une abeille, dans la majorité des cas, il s’envole et se retrouve dans la partie haute de la structure, souvent en se heurtant plusieurs fois aux parois transparentes.
Observations et pistes d’amélioration :
J’ai rapidement construit d’autres versions. A chaque construction et suite à mes observations lors du placement de celles-ci, j’ai des idées pour tenter d’améliorer le système. Depuis un mois, je fais de nombreux tests.
Ce n’est pas très esthétique et un peu encombrant…
Il faut le reconnaitre… c’est plutôt massif et laid ! Ca cache la ruche. Elle reste tout de même bien accessible par l’arrière pour les visites, nourrissage… De plus c’est assez encombrant et il faudra sans doute les démonter pour les ranger l’hiver. Le plastique et le grillage étant fixés sur la structure par des agrafes, cela risque d’être délicat. Pour ça, l’idée de détourner une petite serre pour 2-3 plants de tomates (environ 20€) pourrait être super. La structure est faite de pieds en acier emboitables et elle est facilement démontable.
Ca prend le vent ! 😀
Je savais que ce serait un soucis. Une structure aussi haute avec des bâches en plastique tendues offre une sacrée prise au vent. Comme en plus elle est hyper légère… Mais c’est un faux problème en ce sens où les solutions sont multiples: coincer les pieds avec des blocs de béton, fixer la structure sur le support des ruches…
Une partie des abeilles s’évertue à passer par le grillage.
J’avais espéré que les abeilles apprennent rapidement à passer par le trou qui fait face à leur entrée dans la bâche plutôt que par le grillage au dessus. Je constate qu’une partie d’entre elles persiste à prendre le détour, passer par le haut, à travers le grillage. Nombreuses trouvent tout de même la sortie par l’avant. Par contre, absolument tout le monde rentre dans la ruche par l’avant. C’est déjà ça.
Comme un de mes souhaits est de perturber le moins possible les abeilles, je pense que c’est un point sur lequel des améliorations sont possibles et j’ai quelques idées à tester.
La première qui m’est venue a été d’utiliser une bande autocollante bleue pour rendre plus visible le pourtour du trou dans la bâche transparente aux abeilles. J’ai l’impression que ça aide mais mes observations sont plus empiriques que scientifiques. Je pense aussi à tester, sur la partie basse de la structure, une bâche ou couverture foncée plutôt que transparente pour la rendre le passage plus distinguable aux abeilles.
Sur un modèle j’ai attaché le grillage sur le côté extérieur des lattes du dessus, en le pliant et le bombant un peu, plutôt que de le mette à plat, attaché sur le côté supérieur des lattes. Je me suis aperçu que les abeilles qui passent par le grillage semblent y trouver des passages plus faciles dans les parties bombées. Sans doute à cause d’une légère déformation du grillage qui est plié à cet endroit. Ou peut être est-ce simplement plus facile pour elles de passer un grillage placé verticalement qu’horizontalement ?
Les abeilles attaquent parfois les frelons !
A plusieurs reprises, j’ai pu voir des abeilles attaquer, seules ou en groupe, les frelons prisonniers dans la volière. Je dois reconnaitre que …ça fait plaisir à voir ! Sauf quand à s’acharner dessus elles le font tomber et qu’il trouve la sortie ! 🙂
Certains frelons s’échappent encore
La majorité des frelons se retrouve prisonnier mais il y en a tout de même qui trouvent la sortie. Je pense que c’est le plus souvent accidentel. Si vous avez déjà observé des guêpes coincées et tentant de passer au travers la vitre d’une fenêtre, vous aurez pu observer qu’elles ont tendance à voler vers le haut et en avant. Mais régulièrement, je pense à cause d’un coup de fatigue, elles se laissent presque « tomber » le long de la vitre pour ensuite remonter. Dans le piège, les frelons mettent parfois du temps à trouver la bouteille. Il arrive que certains aient le même comportement que les guêpes sur une vitre et se laissent tomber le long de la bâche en plastique. De temps en temps l’un d’entre eux tombe assez bas, voir jusqu’au sol, et retrouve alors la sortie. J’ai aussi vu des abeilles attaquer un frelon qui s’est alors laissé tombé au sol et s’est enfui. J’ai eu plusieurs idées pour limiter ce problème.
J’ai d’abord imaginé augmenter la hauteur de la volière. J’ai testé des hauteurs d’environ 1,5 à 2 mètres mais n’ai pas l’impression que cela change énormément. Il faut bien sûr une hauteur minimale au dessus de l’entrée de la ruche.
La meilleure piste me semble être de faciliter, accélérer, l’entrée des frelons dans la bouteille piège. J’ai donc testé une cône plus large qu’une bouteille, fait en grillage et placé au centre et au sommet de la volière, orienté vers le haut et qui entre dans une grosse bouteille de 10L. . Sur la même volière j’ai aussi placé une bouteille comme sur le premier piège pour comparer. Un plus grand nombre de frelon entrent dans la petite bouteille sur le côté que par le grand cone en grillage orienté vers le haut.
A noter aussi que j’observe que les frelons entrent plus vite dans la bouteille-entonnoir quand celle-ci est placée dans un des coins du cadre du dessus de la structure plutôt qu’au milieu. Le frelon a tendance à longer de manière répétée les bords du cadre, sous le grillage. Il semble aussi préférer les « longs » bords. Du coup il passe plus souvent près de la bouteille quand elle est placée dans un coin qu’au milieu d’un petit côté. Augmenter le nombre de bouteilles sur la structure pourrait aider. Peut être envisager une bouteille sur chaque coin? Plein de pistes peuvent être testées…
A noter aussi: les frelons dans la bouteille piège retrouvent de temps en temps le passage par le goulot de l’entonnoir. En général ils semblent alors déjà épuisés et mal en point, font un petit tour accroché au grillage et finissent le plus souvent par retourner d’eux même dans la bouteille. J’ai tout de même remarqué que donner un léger angle à la petite bouteille entonnoir, en orientant le goulot légèrement vers le haut, cela arrive moins souvent.
Les frelons asiatiques ont des tailles assez variables. Certains d’entre eux, les plus petits, arrivent à passer au travers les mailles du grillage. Ils ont l’air d’avoir bien du mal mais en forçant finissent par y arriver. Heureusement c’est une très petite minorité des frelons.
Pour conclure, cette volière à frelons, hyper simple à construire, m’apparait comme le piège le plus efficace de ceux que j’ai testés pour protéger mes ruches. Mais je suis loin d’avoir tout essayé. J’espère néanmoins avoir peut être suscité l’envie à d’autres apiculteurs de le tester. Si c’est le cas, n’hésitez pas à apporter vos commentaires et vos idées d’améliorations.
Enfin, j’essaie depuis ce matin une nouvelle amélioration à cette volière et si les résultats se confirment sur quelques jours je pense rapidement faire une mise à jour de cet article parce que j’ai l’impression que c’est une des meilleures améliorations possibles à ce piège. Il est rudement efficace tel quel mais il est possible qu’avec cette amélioration il le soit deux fois plus encore et je vous en reparle bientôt !
MàJ 14/10/2023 : J’ai terminé un article sur cette amélioration, la « Volière à mezzanine ». Vous le trouverez ici !